Enfin. Enfin je peux écrire ce test après environ quatre-vingts heures de jeu. Deuxième opus de la refonte en trois parties du titan vidéoludique qu’était Final Fantasy VII. Mon impatience traduit-elle une urgence à vous transmettre mon enthousiasme dévorant pour Final Fantasy VII : Rebirth ? Une envie de déverser un torrent d’incompréhension et de misère ? Ou simplement ma peur que Founet ne vienne encore toquer à la fenêtre de ma salle de bain pour que je finisse l’article ?
Je vais rentrer directement dans le vif du sujet. Cet article va être compliqué. Polarisé, ou polarisant, selon l’angle de vue. En tous les cas, le test de Final Fantasy VII : Rebirth m’aura amené à me questionner. Premièrement : pourquoi ai-je eu une expérience si différente que ce que l’immense majorité des critiques en ligne semble décrire ? Deuxièmement : comment puis-je écrire ce test sans passer pour un vieux con aigri et condescendant ? Pour déjà répondre à la deuxième, je ne vais probablement pas y arriver.

C’est plus ce que c’était les Hells Angels.
Votre materia Vieux Con est montée de niveau
N’y allons pas par quatre univers parallèles : Final Fantasy VII : Rebirth a été l’une de mes pires expériences vidéoludiques de ces dernières années. J’ai passé une immense majorité de mon temps à pester, à questionner les dieux du jeu vidéo. Comment un jeu pareil a-t-il pu avoir des notes si dithyrambiques, autant au niveau de la presse que des joueurs, nouveaux ou anciens ? Est-ce que l’entier du monde, sauf moi, a reçu des Square-Enix-Dollars pour taire l’horreur que j’ai eu l’impression de vivre en jouant à ce jeu ? Un mystère bien plus passionnant que le jeu lui-même.
En effet, malgré quelques points positifs, dont la nostalgie de ce univers iconique, la modélisation splendide du monde ouvert et les combats très dynamiques, le jeu m’a semblé complètement écrasé par ses défauts. La narration se perd totalement, les activités de l’open world n’ont aucune originalité et sont ultra répétitives. Rebirth est criblé de mini-jeux d’une nullité affligeante et le gameplay paraît absolument vouloir nous faire détester de jouer en nous ralentissant arbitrairement tous les deux mètres. On dirait presque qu’on essaie de rallonger artificiellement la durée de vie. C’est tout à fait choquant (lol).

Mec, tu vas vraiment oser dire que Rebirth n’est pas un bon jeu ?!
Cloud roulerait en Mini-cooper
Étant donné que j’avais adoré Remake lors de sa sortie, donc le tiers de cette refonte, j’avoue que j’attendais avec pas mal d’impatience la suite. D’autant qu’on nous avait promis, enfin, la sortie de Midgard. Je me suis lancé dans cette suite avec beaucoup d’enthousiasme. FF7 était mythique et son « monde ouvert » m’avait marqué son époque (année de la sortie de L’associée du diable et Will Hunting, il y a… vingt-huit ans, damn). Je me réjouissais donc de retrouver une partie au moins de l’émerveillement que m’avait procuré la découverte de ce monde incroyable.
Et bien, sortis de Nibelheim, nous arrivons effectivement dans ce fameux monde ouvert. Au début, cela a très bien fonctionné pour moi. L’environnement est superbe et le plaisir nostalgique de retrouver les souvenirs de mon adolescence sublimés à ce point était jouissif et a été quasiment autosuffisant à ma satisfaction de jeu durant les premières heures. Cet aspect du jeu marche à merveille et constitue LA réussite de cet opus. Je me demande si c’est uniquement cela qui a généré un enthousiasme pareil chez la majorité des joueuses et joueurs. La possibilité de revisiter ce monde magique maintenant soutenu par des graphismes et des animations magnifiques ?

C’est assez joli, il faut l’avouer.
Malheureusement, les activités du monde ouvert sont des copiés-collés d’un Ubisoft classique, avec les tours pour découvrir la carte, quelques combats, des sortes de mini jeux, des ressources à collecter partout et ce sont à 100% les mêmes activités dans chaque zone. Ces activités ont le seul mérite de donner quelque chose à faire si l’on aime se balader dans ce monde haut en couleur, mais le tout est une misère d’originalité et globalement sans intérêt. Finalement FF7 Rebirth pour moi est l’équivalent de la « nouvelle » mini Cooper lors de sa sortie, ce n’est pas vraiment une bonne voiture, elle est beaucoup trop chère pour ce qu’elle est, trop lourde et très peu pratique ; son succès n’est dû qu’à sa réussite à jouer à la fois sur la corde de la nostalgie et d’un nouveau design très réussi. Oui, j’ai comparé FF7 à une caisse ; la faute à Founet qui nous pousse à un journalisme de l’extrême.

La capture de chocobos, un grand moment de nullité vidéoludique.
La palme ex æquo des activités merdiques revient quand même aux séquences visant à attraper les chocobos et le « truc » pour réunir les moogles. Ces deux activités sont nulles à un point qui reste difficile à appréhender. Comment un gameplay aussi pourri peut-il finir dans un jeu qui a un budget pareil et des notes aussi bonnes ? Sérieusement, c’est incompréhensible pour moi. Comme dans beaucoup d’activités proposées par le jeu, le gameplay y est inexistant et digne d’un jeu en plastoc tout moisi d’un Kinder Surprise. Soulignons également que si certaines choses sont évitables (les moogles de l’enfer), d’autres font malheureusement partie de la trame principale, dont les chocobos. Autre exemple : la phase où l’on doit jeter des caisses pendant une heure avec Cait Sith. Obligatoire elle aussi. Mon dieu. Il s’agit de la pire séance de gameplay de l’histoire du jeu vidéo. Ou alors juste derrière ces petits couloirs étroits où nos personnages s’enfilent très lentement pour casser le rythme du jeu (il y en a aussi dans Rebirth, ne vous inquiétez pas). Bref, c’est très très nul.

Alors qu’on pensait avoir touché le fond en termes de gameplay avec la capture de chocobos, heureusement les moogles viennent nous montrer qu’il est toujours possible de repousser les limites.

Puis finalement, vient la séquence de Cait Sith qui met tout le monde d’accord en termes de merditude.
Chadley, sa vie, son règne de terreur
Oui, je fais un sous-chapitre entier sur Chadley. Il le mérite. Ce personnage représente tout ce qui ne va pas avec Rebirth. Cette valeureuse intelligence artificielle, aux airs d’un McLesgy façon Shonen, est là pour nous accompagner et nous expliquer le monde qui nous entoure. Car nous sommes bêtes et Cloud aussi apparemment. Surfant sur la vague de la technologie moderne et de l’interruption volontaire du gameplay, ce brave homme nous appelle sur notre portable dès qu’il pense judicieux de nous expliquer « Ceci est un escalier » ou « Vous venez de trouver une pomme ». Non, OK, j’exagère, il vient nous féliciter d’avoir ouvert une zone par exemple ou débloqué un mini jeu. Le problème c’est que ce personnage est absolument inintéressant, n’a aucune personnalité, nous interrompt tout le temps pour rien et remplace tout une partie de ce qui aurait dû être une aventure trépidante. Car oui, les nouvelles Matéria d’invocations, nos potes Bahamut, Ifrit et autres Shiva, figures de proue de l’univers de Final Fantasy, se débloquent en allant les battre dans une simulation de Chadley. C’est bien ça, on va vite jouer à une simulation sans contexte pour débloquer les créatures les plus emblématiques de FF7. Sniff.

Non-Monsieur, arrêtez de m’appeler, je ne veux pas changer d’assurance. Comment avez-vous eu ce numéro d’ailleurs ??
Evitement-ception
Dans Final Fantasy VII : Rebirth, vous trouverez également Queen’s Blood. Comme il est de bon ton ces dernières années, tout bon RPG possède son jeu de cartes intégré à l’univers du jeu. J’ai adoré Queen’s Blood ! Fou, hein ? Un point positif relevé par le vieil aigri au milieu de tout ça. Qu’est-ce que cela avait de si bien Queen’s Blood alors ? Hé bien, vous savez on dit souvent que l’on joue aux jeux vidéo pour éviter la réalité ? Queen’s Blood m’a permis d’éviter la réalité numérique de FF7 Rebirth. De petites oasis où le gameplay affreux de Rebirth et son scénario qui s’autodigère me laissaient tranquille pendant que je jouais aux cartes, peinard. Quel bonheur. Très concrètement, ce jeu de cartes est plutôt sympa et bien pensé, même si passé un certain point on capte le « truc » et le challenge tombe considérablement. Mais j’ai aimé.

Battre Chadley à Queen’s Blood est le seul truc convivial du jeu qui l’implique.
Crise de Cohérence (Cardiaque)
L’autre point qui a malmené avec véhémence mon expérience vient du rythme et du ton de la narration. Alors que la trame du jeu démarre relativement bien, avec les spectres de la guerre, de l’écologie et de l’écoterrorisme en fond, pour moi il n’a pas survécu aux innombrables changements de ton qui surviennent comme du plutonium enrichi sur la soupe. Bien sûr que ce type de dissonance entre l’humour, la légèreté et le drame n’est pas mauvais en soi et à tendance à se retrouver dans pas mal de JRPG, mais le mélange ne fonctionnait simplement plus dans Rebirth. Contrairement à un Like a Dragon par exemple qui, tout en étant loufoque au possible, était bien meilleur pour garder une cohérence interne à l’ensemble et réussir à amener des émotions lorsqu’il le voulait. Dans Rebirth, entre le nombre ahurissant de mini-jeux ultras niais, de passages à la plage pour flirter et siroter des cocktails, les aller-retour au gold saucer et l’attitude complètement dissociée des personnages qui abordent la fin du monde avec le ton d’un épisode de Big Bang Theory. Désolé, mais la sauce ne prend pas du tout pour moi.

Sephiroth va détruire le multivers, mais vite allons boire des cocktails sur la plage !
Puis il y a le rapport entre les personnages qui empire au fur et à mesure du développement de l’histoire. Il y a tellement de comportements complètement incohérents. Aerith et Tifa qui semblent être des robots ne pouvant qu’être d’humeur enjouée quelque soit la situation et qui continuent à vénérer Cloud alors que ce dernier a une attitude absolument abjecte la moitié du temps. Ajoutez les moments où Cloud pète littéralement un câble du fait de ses traumatismes de guerre et personne ne réagit vraiment, alors qu’il manque de tuer des gens. Juste un petit « Hé mec, quand même », tandis qu’ils s’insurgent quand les méchants du gouvernement font de même. Pourtant Dieu sait s’il y avait matière à faire quelque chose d’intéressant avec le personnage de Cloud et son rapport à la violence.

Mais non Tifa, tu n’es pas du tout hypersexualisée, je ne comprends pas de quoi tu parles, arrête tes wokeries.
Sephiroth et les parallax
Là où le bât blesse (encore plus), c’est que l’histoire devient tellement lourde et inintelligible avec ses errances d’univers parallèles qu’elle finit par complètement détruire l’importance relative de toute autre problématique de l’histoire que ce soit politique ou personnelle. Au final, j’en aurais presque préféré que le jeu reste dans la prédominante légère, comme une sorte de gros parc à thème avec des mini jeux dans l’univers de Final Fantasy VII. Parce que oui, autant j’avais adoré le twist de la fin de Remake, autant là l’idée tire terriblement en longueur. Avec un Sephiroth qui en devient ennuyant en fin de jeu tellement toute sa personnalité a été remaniée pour en faire le maître autoproclamé du multivers de FF7. Et ils se sont même amusés à toucher au pivot narratif le plus important de FF7 pour en faire un élément qui ne semble plus avoir d’importance. Oui, je parle d’Aerith.

Le jeu n’essaie même pas d’être discret quand il nous tient le pad. La pierre jaune ne suffisait pas. Prochaine étape un type vient chez toi te dire comment allumer ta console ?
Vous l’aurez compris, Final Fantasy VII : Rebirth m’a littéralement perdu (vers son milieu), n’ayant quasi plus aucun intérêt ni pour les personnages ou l’histoire et encore moins pour les enjeux de gameplay qui m’ont paru inexistants. Les combats, sur lesquelles je ne m’étendrai pas, n’ont demandé aucune tactique en mode normal pour la grande majorité du jeu (hormis le dernier boss). Personnellement, le mix tour par tour et temps réel ne fonctionnait plus non plus, trop d’incohérence là aussi. Lorsqu’une attaque déclenchée en tour par tour nécessite une certaine distance par exemple, mais que les mouvements ne sont pas en tour par tour, cela donne quelque chose de peu intuitif et trop brouillon (à mon goût). De toute façon, 99% des combats passent en bourrinant.

Probablement le meilleur personnage de Rebirth.
Le langage de l’amour vidéoludique
Au final, vous l’aurez probablement compris, je n’ai pas aimé du tout. Mais je pense que la réponse à la question 1) tient à une équation assez simple. Lorsque vous mettez les aspects positifs et négatifs du jeu ensemble, force est de constater que certains de ces aspects compteront plus pour certaines personnes que d’autres. La pondération des variables est différente en somme. Pour moi, l’impact des aspects négatifs de Rebirth, surtout l’écriture et le gameplay hors des combats, a largement écrasé le plaisir qu’a pu me procurer le monde ouvert ou la nostalgie. Apparemment pour beaucoup ce n’était pas le cas vu les réactions du public. Let’s agree to disagree.
En gros pour savoir si aimerez Final Fantasy VII : Rebirth, c’est comme en amour, il faudra connaître vos propres sensibilités et vos non-négociables. Connaître votre propre langage vidéoludique finalement, pour savoir si ce Rebirth saura vous parler. C’est assez simple finalement. Par exemple, si vous aimez vous laisser aveugler par la nostalgie et n’avez aucun goû… Ah non, pardon, le patron toque à la fenêtre.
Note : 4 chocobos galeux sur 10.
Testé sur PS5, également disponible sur PC depuis peu.